La mise en vibration cohérente de nanosystèmes donne l’opportunité de sonder leurs propriétés élastiques à l’échelle du nanomètre. Elle permet aussi d’aborder des problématiques telles que la limite de validité en taille de l’hypothèse du milieu continu, le rôle des champs de contraintes internes, l’impact des procédés de structuration sur la réponse mécanique de ces entités, l’effet des atomes de surface. Le paysage vibrationnel de ces petites entités dépend certes de paramètres intrinsèques tels que la taille, la forme, les constantes élastiques mais également la nature du couplage avec l’environnement et plus particulièrement avec le substrat sur lequel elles reposent. Ainsi, l’étude de systèmes modèles habituellement privilégiée par l’équipe « Acoustique pour les NanoSciences » de l’INSP se heurtait à un manque de confinement acoustique au sein de ces nanosystèmes. Cette limitation a été récemment levée grâce à l’utilisation de nanofils libres, en collaboration avec l’IM2NP d’Aix-Marseille et le GSI Helmholtz Centre for Heavy Ion Research de Darmstadt. |
L’équipe allemande a fabriqué des nanofils de cuivre par électro-déposition : une membrane de polycarbonate (30 µm d’épaisseur) est irradiée par des ions Au25+ accélérés sous quelques GeV, puis les trajectoires des ions sont révélées par attaque chimique dans une solution de NaOH. Ceci crée des pores cylindriques qui sont ensuite remplis par électro-déposition. Après dissolution de la membrane, les nanofils en suspension sont dispersés sur un substrat de silicium structuré présentant des tranchées périodiques (Figure 1).
Après dispersion des nanofils au dessus des tranchés, l’excitation des modes propres de vibration est obtenue par l’absorption d’impulsions lasers femtosecondes. Leur détection est assurée par un schéma optique de type pompe sonde, autorisant des résolutions temporelles de l’ordre de la picoseconde. Ainsi, l’équipe de l’INSP a pu démontrer une augmentation conséquente du temps de vie des modes propres aboutissant à des facteurs de qualité encore jamais atteints sur de tels systèmes. La figure 2a illustre le faible amortissement du mode fondamental qui perdure sur près de 10 ns.
Plusieurs conséquences découlent de ce fort confinement acoustique :
- La réponse spectrale exhibe des pics extrêmement étroits (Figure 2b). Ce point offre la possibilité d’étudier à terme l’effet de la cristallographie, qui, dans le cas des systèmes élastiquement anisotropes, devrait conduire à une structure fine plus riche composée de plusieurs contributions spectralement rapprochées.
- Nous avons identifié les signatures vibrationnelles correspondant aux deux premières harmoniques en plus du mode fondamental (Figure 3) alors que les études conventionnelles ne mettaient jusqu’à présent en évidence que le mode fondamental. Ces modes appelés mode de respiration correspondent à des déplacements radiaux présentant plusieurs nœuds. Ces nouvelles signatures devraient à terme faciliter l’étude des effets liés à la réduction de taille des systèmes.
- Cette très bonne résolution spectrale nous a également permis de mettre en évidence des couplages acoustiques entre deux nanofils très proches. Ce couplage qui se manifeste par des battements sur la réponse temporelle, aboutit à un dédoublement du mode fondamental (Figure 4).
Les perspectives de ce travail peuvent se décliner sur différents registres : propagation guidée, sources acoustiques, effet de l’anisotropie cristalline, systèmes cœur-coquille…
Référence
« Vibrational response of free standing single copper nanowire through transient reflectivity microscopy »
Belliard, L (Belliard, Laurent) ; Cornelius, TW (Cornelius, Thomas W.) ; Perrin, B (Perrin, Bernard) ; Kacemi, N (Kacemi, Nazim) ; Becerra, L (Becerra, Loic) ; Thomas, O (Thomas, Olivier) ; Toimil-Molares, ME (Toimil-Molares, Maria Eugenia) ; Cassinelli, M (Cassinelli, Marco)
JOURNAL OF APPLIED PHYSICS, Volume : 114 (2013)
Contact
Laurent Belliard